Amani Itakuya #5: Est-ce que la transparence est en faveur d’une distribution plus équitable des revenus?

Est-ce que la transparence est en faveur d’une distribution plus équitable des revenus?

(photos © Manuel Wollschläger)

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Manuel Wollschläger

Nombreux sont les initiatives préoccupées de l’augmentation de la transparence dans l’exploitation des ressources naturelles en R.D. Congo [1]. Elles se basent sur deux objectives principaux: D’un côté couper l’alimentation du conflit par le commerce illégale des minerais, de l’autre côté combattre la pauvreté. Pendant que le premier but devrait être atteint par la certification et la traçabilité, l’amélioration des conditions de vie des Congolais dépendra de la bonne gouvernance dans le secteur public et de la formalisation du secteur artisanal.

Un avancement était facilité par la législation américaine ainsi que l’Initiative de Transparence des Industries Extractives (ITIE). La loi Dodd-Frank demande à l’industrie de connaitre l’origine des matières premières utilisées afin d’exclure l’implication des groupes armés dans le commerce. L’ITIE demande les gouvernements et les entreprises de rendre public les paiements reçus et versés. Ces ambitions se manifestent dans un des protocoles de la Conférence Internationale de la Région des Grands Lacs (CIRGL) sur le commerce illicite des ressources naturelles. Dans l’idéal, de cette manière les groupes armés ne pourraient plus s’approvisionner à travers les revenus générés dans l’exploitation minière lesquels seront visibles dans la caisse de l’état. Aussi le code national en R.D. Congo exige une formalisation du secteur minier artisanal, afin que les gains de l’exploitation et du commerce puissent servir du bien-être de la communauté à travers l’alimentation du trésor public.

La méfiance envers ces concepts reste vive et les obstacles sont nombreux : L’industrie se sent freiné dans ces ambitions par une règlementation trop exigeante. Elle suggère que les réglementations conduisent plutôt au refus de s’approvisionner en matière première dans la région. Les investisseurs formels sur place demandent des exonérations avant de prendre le risque de s’implanter en R.D. Congo. De même les entreprises argumentent que leur rôle en tant qu’acteur économique implique une responsabilité sociale limitée. Ils considèrent que la création de l’emploi et des infrastructures serait déjà une contribution au développement substantiel. L’Etat lui reste en difficulté d’alimenter son propre fonctionnement ce qui l’empêche de se lancer dans les investissements sociaux.

La population elle-même perd des revenus de subsistance dans le marché informel. Aussi elle choisit ses représentants sans avoir beaucoup d’influence sur l’utilisation des retombés du secteur des ressources naturelles, le processus budgétaire étant ni participatif ni décentralisé. Les creuseurs se voient donc éliminés en faveur de l’exploitation industrielle laquelle ramène une croissance économique mais n’améliore pas automatiquement le sort des pauvres. Aussi ceux qui sont organisés en coopératives ne gagnent pas forcement mieux leur vie : L’absence de l’attribution des zones destinées à l’exploitation artisanale par l’état les laisse dans une situation hors du droit.

Est-ce qu’il faut désespérer ? La législation dans l’Union Européenne semble d’écouter les voix de la société civile. Il est possible qu’elle aille soutenir les incitations lancées par la loi Dodd-Frank, même si le lobbying de l’industrie des deux côtés de l’océan reste musclé. En même temps la R.D. Congo continu de se conformer à l’ITIE ayant été accordé d’une période de grâce afin de corriger ces rapports déficitaires.

Le dialogue entre les parties prenantes sur le terrain s’institutionnalise car tout le monde veut éviter une situation d’embargo. Donc, aussi grâce à une pression de l’extérieur, alimenté par le plaidoyer de la société civile locale, on commence de voir de plus en plus claire sur les différents besoins ainsi que la taille du gâteau. De quelle manière il serait partagé est une question politique qui serait à résoudre au niveau national. Si il y aura une juste portion pour les communautés locale dépendra du niveau de la participation dans la procédure démocratique de prise de décision sur l’allocation du budget public mais aussi du pouvoir de négociation de ces représentants envers les investisseurs ou des coopératives des creuseurs envers les acheteur de minerais. Uniquement des décisions prises en consensus ramèneront à la fameuse situation gagnant-gagnant.

  

Manuel Wollschläger est Conseiller Technique dans le cadre du programme allemand Service Civile pour la Paix (AGEH) avec CENADEP Bukavu.


[1] Pour une bonne synthese, voir: “Conflict minerals – An evaluation of the Dodd-Frank Act and other resource-related measures” par Andreas Manhart & Tobias Schleicher, Öko-Institut e.V. (2013).

Comments
One Response to “Amani Itakuya #5: Est-ce que la transparence est en faveur d’une distribution plus équitable des revenus?”
  1. Lamar says:

    Je vois directement que vous maîtrisez très bien le
    thème

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